Nelson Mandela vient de fêter 91 printemps. Cet homme hors du commun, aujourd'hui, est reconnu dans le monde entier comme une figure de courage, d'intelligence,d'abnégation. Il y a une vingtaine d'années son nom était inconnu de 85% des Français. Le Parti communiste français, les jeunes communistes, "l'Humanité" ont mené pendant de nombreuses années une campagne pour la libération de Nelson Mandela. Certains se souviennent, peut-être, des manifestations devant l'ambassade sud africaine durement réprimées par les CRS. D'autres auront gardé les images des fêtes de l'Huma, des affiches, des tracts avec Mandela comme drapeau. En 2009, ceux qui n'ont rien fait pour la libération de Mandela et se complaisaient dans des relations complices avec le régime raciste sud-africain
célèbrent à la manière people l'anniversaire de celui qui symbolise un combat qu'ils n'ont jamais partagé. J'ai eu la chance et l'honneur de rencontrer à Paris Nelson Mandela quelques jours après sa libération. Ils ne se faisaient aucune illusion quant aux honneurs qui lui étaient accordées. Voici l'éditorial que j'ai consacré dans les colonnes de l'Humanité à l'occasion de son élection à la présidence de la République sud-africaine.
"Au printemps 1962, Nelson Mandela effectua, pour la première fois de sa vie, un voyage à l’étranger. Un périple au cours duquel il participa à la Conférence panafricaine. Puis il séjourna à Londres. « Cette tournée m’a laissé une très forte impression. Pour la première fois dans ma vie, j’étais un homme libre. Libre de l’oppression blanche, de l’idiotie de l’apartheid et de l’arrogance raciale, libre des coups de la police, libre de l’humiliation et de l’indignité. Partout où j’allais, j’étais traité en être humain. » Hier, peu avant midi, Nelson Mandela a été élu à l’unanimité, par la nouvelle Assemblée nationale, président de la République sud-africaine. A ce moment précis, nous avions en tête les images du plus ancien prisonnier du monde et sa libération un jour du mois de février 1990. Il n’y a aucune honte à dire que, devant notre écran de télévision, nous y sommes allés de notre larme. La lutte contre le racisme, pour la liberté et la démocratie trouvait en cet instant un accomplissement.
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Nelson Mandela est, enfin et pleinement, un homme libre. En écoutant les hymnes sud-africains, il y a fort à parier que l’ancien banni de Robben Island pensait à ses frères de combat tombés au cours de ces longues années de clandestinité et de détention, tous ceux qui ont été assassinés, torturés, emprisonnés parce qu’ils combattaient l’apartheid, ce régime raciste institutionnalisé que certains en France et ailleurs soutenaient indignement. Monsieur le Président Mandela, camarade Nelson, nous vous souhaitons une longue vie, du bonheur et de la réussite dans votre immense tâche. Votre succès, celui de l’ANC et du peuple sud-africain, Noirs, Blancs, Indiens et métis confondus, confirment que la marche du monde, malgré malheurs et douleurs, peut être aussi ponctuée de succès, de victoires, d’optimisme.
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Hier, en milieu de journée, le peuple sud-africain était en fête. Pas seulement lui. L’élection de Nelson Mandela constitue un progrès considérable dans la dure marche émancipatrice des peuples africains, un exemple significatif pour l’ensemble de ce continent : la liberté, la souveraineté et la démocratie peuvent être conquises. Mais on aurait tort de limiter cet événement historique à la seule Afrique. Le monde entier, hier, avait les yeux rivés sur Le Cap. Qu’ont ressenti les Noirs nord-américains et leurs frères latinos, sinon une immense et légitime fierté, un énorme espoir ? Qu’ont perçu tous ceux qui souffrent et se battent, sinon un encouragement à ne jamais baisser les bras, même aux pires moments, lorsque l’on croit que tout est perdu ?.
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Le nouveau président sud-africain a indiqué dans son premier discours que « tout restait à faire ». Il a invité à « l’unité dans la diversité » pour sortir une partie importante de la population du sous-développement. Nelson Mandela se veut rassembleur, homme de droit, de justice, de liberté. Dans son combat, il rencontrera des obstacles et des oppositions parfois violentes. Le soutenir, l’aider n’est pas seulement un acte de solidarité, c’est aider l’Afrique et le monde à changer."